Strain Gauge

Présentation des jauges de contrainte

La jauge de contrainte est basée sur le phénomène suivant : l'élongation d'une bande de métal conductrice ne la rend pas seulement plus longue et plus fine mais augmente aussi la résistance électrique d'un bout à l'autre de la bande. À l'inverse, une compression (sans la faire plier) ne la rend pas seulement plus courte et large mais diminue aussi sa résistance électrique. À condition que ces forces ne dépassent pas les limites élastiques de la bande (ce qui causerait une déformation permanente), la bande conductrice peut être utilisée de manière répétée pour mesurer la force mécanique à laquelle est soumis l'objet collé sur la bande. En d'autres termes, il s'agit d'un transducteur qui convertit des variations de force mécanique en variations de résistance électrique.

Les jauges de contrainte sont largement utilisées dans la recherche en ingénierie mécanique pour déterminer les contraintes générées par de la machinerie lourde, par exemple, et déterminer les limites de sécurité de l'équipement et de son environnement. Il est difficile d'exagérer l'importance de ce point : par exemple, les essais sur les composants d'avions dépendent forcément de jauges de contrainte pour déterminer leur état et leur degré de sécurité : des jauges de contrainte miniatures sont souvent collées à des liaisons mécaniques ou des éléments de structure constituant le fuselage afin de mesurer le degré de contrainte mécanique que ces éléments subissent. Dans la plupart des applications, les jauges de contrainte sont très petites et ne dépassent pas la taille d'un timbre-poste ordinaire. La taille des plus petites jauges ne dépasse pas 0,38 cm et elles peuvent mesurer des forces de contrainte minuscules atteignant 0,00001 mm par mm.

 

Historique

L'une des premières jauges de contrainte, la jauge de contrainte à résistance, a été inventée en 1856 par le mathématicien, ingénieur et physicien britannique William Thompson, qui est plus tard devenu le Premier Baron Kelvin. Il a découvert que la résistance électrique d'un fil de fer ou de cuivre augmentait ou diminuait lorsque le fil était soumis une élongation (ou une compression).

Suite à cette découverte, la plupart des jauges de contrainte ont pris la forme assez encombrante de miroirs et de leviers optiques ou de systèmes de leviers mécaniques composés, même si elles étaient capables de détecter des déformations d’à peine 0,001 mm. Avec leur longueur allant de 12 à 25 mm, elles avaient tendance à être assez grandes et lourdes par rapport aux jauges de contrainte modernes, ce qui les empêchait de détecter de manière précise les contraintes variables causées par une charge dynamique dans une structure.

L'ingénieur électricien Edward Simmons et son collègue, l'ingénieur mécanicien Arthur Ruge, ont inventé la jauge de contrainte encollée à résistance de fil en 1938. La conception de base de ce transducteur est encore utilisée aujourd'hui. À l'origine, il avait la forme d'un fil électrique exceptionnellement fin qui était bouclé soigneusement sous forme de grille, puis pris en sandwich entre deux feuilles ultra-fines de papier (du ciment permettait d'éviter au fil de glisser entre les feuilles de papier). Le capteur était ensuite collé à la surface de la machine ou de la structure dans laquelle les contraintes devaient être mesurées.

À mesure que la structure subit des forces de contrainte de déformation, tout étirement ou toute contraction de la surface est reflété par une variation similaire sur la jauge de contrainte, qui est alimentée électriquement. Le courant qui traverse la jauge de contrainte est soumis à une résistance qui dépend de la contrainte (étirement ou compression) exercée sur la jauge. La jauge convertit ensuite la variation de résistance en mesure de contrainte lisible sur un affichage.

 

Aspects techniques

Dans l'état non contraint, la plupart des jauges de contrainte présentent une résistance électrique allant de 3 à 30 Ω. Les limites élastiques de la jauge imposent inévitablement des forces sur le composant, avec une résistance variant faiblement lorsque la limite sur la force est atteinte. Des forces plus importantes auraient pour effet de déformer la jauge de manière permanente et ainsi de la détruire. Cela signifie que de légères variations de résistance, habituellement à peine plus d’une fraction de point de pourcentage, doivent être mesurées avec une très haute précision. Les tensions de sortie sont généralement de 5 V ou 12 V et la sortie est mesurée en millivolts.

Des ponts de mesure sont habituellement utilisés dans les jauges de contraintes modernes pour répondre à ces exigences et obtenir des mesures précises. Ceci était auparavant réalisé par un pont de Wheatstone, un circuit qui nécessite une intervention humaine et un détecteur d'équilibre nul pour maintenir un état équilibré. Aujourd'hui, ces dispositifs cèdent la place à des circuits de pont à jauge de contrainte qui incorporent un voltmètre haute précision au centre du circuit pour mesurer directement le degré de déséquilibre induit.

Bien que la conception en « sandwich de papier et de câble » décrite dans la section ci-dessus soit essentiellement la même que dans les jauges de contrainte contemporaines, les matériaux ont changé : ils sont fabriqués sous forme de grilles de circuits imprimés en zigzag et gravés sur des feuilles fines et plates en constantan. Le constantan est désormais le matériau le plus couramment utilisé dans les jauges de contrainte : il s'agit d'un alliage hautement sensible aux contraintes et idéal pour entrer dans la composition des feuilles de la jauge. Les feuilles sont collées à un substrat en plastique non conducteur nommé le porteur, qui est généralement constitué d'époxy, ou d'époxy phénolique ou polyamide renforcé de fibres de verre. Le plastique porteur permet de manipuler la jauge sans l'endommager, mais son épaisseur ne dépasse généralement pas 0,0025 mm.

Les jauges de contrainte détectent des déformations causées par contraction ou expansion thermique dans les structures auxquelles elles sont collées, c'est pourquoi il est considéré comme une bonne pratique d'éviter le chauffage produit par le composant en lui-même en raison de tensions d'entrée excessives.

 

Domaines d'utilisation des jauges de contrainte dans la production

Les jauges de contrainte prolifèrent dans le monde entier dans un grand nombre d'applications industrielles. Elles sont couramment utilisées dans les cellules de charge des ponts-bascules, des trémies et des balances de diverses sortes, ainsi que dans les applications pédagogiques et médicales. Comme indiqué précédemment, elles sont largement utilisées en recherche et développement pour l'ingénierie mécanique afin de tester l'état et la sécurité de l'équipement automobile, aéronautique et médical, ainsi que l'équipement et les machines utilisés dans les industries du pétrole, du gaz et de la production d'énergie. Les bâtiments et les ponts sont aussi équipés de jauges de contrainte pour surveiller en permanence leur intégrité et leur sécurité structurelles.

Ils sont extrêmement robustes et peuvent supporter des conditions extrêmes comme dans le cas de l'équipement cryogénique, avec des températures pouvant aller de -269 °C à 1300 °C, ainsi que dans les zones exposées à de fortes radiations. Les structures ou les machines soumises à des niveaux extrêmement élevés de vibrations sont aussi régulièrement équipées de jauges de contrainte, tout comme les applications subissant de fortes élongations.

 

Différence entre les jauges de contrainte et les autres capteurs
 

Bien qu'il s'agisse d'un type de transducteur, les jauges de contrainte sont uniques dans la mesure où elles convertissent des variations de force mécanique en variations de résistance électrique, qui sont ensuite converties en mesure de contrainte.