Accidents du travail : les manutentions manuelles très souvent en cause

50% des accidents du travail sont imputables à la manipulation manuelle. Soit 1 accident de travail sur 2. Un pourcentage élevé qui n’a rien de surprenant : malgré la mécanisation et l’automatisation de nombreuses tâches manuelles, les opérations de manipulation manuelle sont courantes dans de nombreux secteurs d’activité.

Si aucun secteur de travail n’est épargné, certains secteurs sont toutefois plus à risques que d’autres : le BTP, l’industrie, la logistique mais aussi les métiers liés aux soins à la personne – infirmière, aide-soignante, brancardier, auxiliaire de vie…

La manipulation de charges, les gestes répétitifs et les mauvaises postures font peser de nombreux risques sur notre corps en mettant à rude épreuve la colonne vertébrale, les muscles, les tendons et les nerfs au niveau des articulations des épaules, des coudes, des poignets ou encore des mains….

Des manipulations à risques donc, souvent induites par diverses émotions et états psychiques : l’habitude, la distraction, la lassitude, la fatigue, le stress, l’ignorance des bonnes pratiques…

Leurs conséquences sont plus ou moins douloureuses et ou invalidantes : contusions, plaies, fractures, luxations, douleurs dorsales, déchirures musculaires, lumbagos, tendinites, troubles musculosquelettiques (TMS), mais aussi chutes (chute de l’opérateur ou de la charge manipulée) - un mal s’ajoutant à un mal quand on saura qu’en 2022, les chutes de hauteur demeurent l’une des causes majeures des accidents de travail mortels.

Levage, pose, poussée, traction, port, déplacement… Quand le transport ou le soutien d’une charge implique des efforts physiques, on parle de manipulation manuelle, selon la définition donnée par le Code du travail.

La réduction des accidents du travail liés à la manutention manuelle est un enjeu majeur de santé publique et de santé au travail.

Le Code du travail consacre plusieurs articles aux manipulations manuelles de charges (Art R.4541-1 à R.4541-10) : La prévention des risques liés à ces opérations, capitale, se traduit par une série de mesures concrètes.

Les entreprises qui comprennent au moins 50 employés doivent établir un diagnostic de pénibilité.

Ce diagnostic repose sur la prise en considération de 6 facteurs de risques suivants : travail de nuit, travail répétitif ou en équipes alternantes, présence de vibrations ou de bruit, position contraignante.

Si au moins 25% des employés de l’entreprise sont exposés à des manipulations de charge, il faut établir un plan de prévention de pénibilité.

Le Code du travail est formel : dans la mesure du possible, les équipements et les systèmes permettant de mécaniser et d’automatiser certaines tâches doivent être utilisées.

Pour le levage, ce seront par exemple des chariots élévateurs, des ponts roulants ou des grues. D’autre part, certains outils comme les palonniers, les treuils ou des accessoires comme les crics, les vérins, les crochets ou des tables élévatrices peuvent aider aux manutentions manuelles.

À savoir : Toutes les manipulations manuelles ne sont pas mécanisables

La mécanisation du port de charges n'est pas toujours possible ou rentable. En effet, il faut tenir compte du coût de l'investissement en matériel, de la formation des opérateurs et de la maintenance des équipements. De plus, la mécanisation peut parfois s'avérer moins flexible que l'intervention humaine, notamment dans le cas de certaines tâches complexes ou qui nécessitent la présence humaine

• Le transport dans des environnements contraignants
  • Le chargement et le déchargement des camions avec palettes volumineuses
  • Le port de charges en hauteur, par exemple sur un échafaudage
  • Le déplacement de charges dans des espaces difficiles d’accès ou à risques, dans des cuves par exemple ou dans des zones ATEX
• Dans les métiers qui nécessitent un contact humain
  • Les soins à la personnes âgées ou en situation de handicap
  • Le transport de patients dans les hôpitaux

Pas de prévention sans évaluation des risques (Code du travail, article R 4541-6 + arrêté du 29 janvier 1993).

Pour réaliser cette évaluation, à consigner dans le DUERP (Document Unique d'Évaluation des Risques Professionnels), les facteurs suivants sont en prendre en compte : la nature de la charge physique, les efforts physiques requis, les caractéristiques du milieu professionnel, les exigences de l’activité - répétitivité des gestes, postures adoptées - les facteurs de risque individuels du risque.

Pour cette évaluation, l’employeur doit être accompagné de la médecine du travail, du CHSCT (Comité d'Hygiène, de Sécurité et des Conditions de Travail) et des délégués du personnel.

À savoir : La norme AFNOR X35-109

Cette norme peut être considérée comme un outil d’aide : elle indique des valeurs seuils d'exposition aux risques, propose une méthodologie d’évaluation des risques liés aux manipulations manuelles et délivre des recommandations pour prévenir ces risques.

Il n’existe pas de texte règlementaire qui décrirait avec précision la catégorie des équipements professionnels individuels (EPI) adaptés aux manipulations.

La formation des employés aux méthodes de travail et à l’organisation de leurs postes de travail est exigée par le Code de travail. Quelles en sont les étapes ?

1. Délivrer une information

Au sujet des risques afférents au poids des charges à manipuler et à l’utilisation des engins de manutention et des machines : il ne faudrait pas que la solution se transforme en un nouveau danger.

À savoir : Des valeurs seuils et des interdictions

• Pour manipuler une charge de 55kg et plus, il faut être reconnu apte par la médecine du travail
• Dans tous les cas, la charge à déplacer manuellement ne doit pas excéder les 105 kg (Code du travail, art R4541-9).
• Les femmes ne sont pas autorisées à porter des charges supérieures à 25kg. Et avec une brouette ? La charge déplacée ne doit pas être supérieure à 40 kg - poids de la brouette comprise.
• Le diable est interdit aux femmes enceintes (Art D 4152-12)
• Quant aux plus jeunes des employés, ils doivent passer une visite médicale pour être déclarés aptes à manipuler des charges excédant 20 % de leur poids (Code du travail, art R 4153-52).

2. Organiser une formation générale à la sécurité

Elle est obligatoire pour les travailleurs nouvellement embauchés, les travailleurs temporaires, et dans le cas de changement de postes.

Inculquer les gestes techniques à adopter et les bonnes pratiques/postures.

Bon à savoir : Quelques conseils pour soulever des charges en toute sécurité

• Être à la bonne distance de la charge à manipuler

Plus la distance qui sépare l’opérateur de la charge à manipuler est grande, plus la force nécessaire pour la soulever sera importante, ce qui peut entraîner des blessures au dos, aux épaules et aux bras. A considérer aussi : le risque de chute augmente avec la distance. Enfin, la fatigue s'installe plus rapidement lorsque l'on manipule des charges à une distance trop importante.

• Adopter des postures adaptées

Pour soulever une charge en toute sécurité et éviter les blessures, il est important de bien positionner sa colonne vertébrale et son bassin :

• On garde le dos droit et la colonne vertébrale alignée.
• On fléchit les genoux et non le dos pour soulever la charge.
• On veille à ses appuis.
• On utilise la force de ses cuisses pour soulever la charge.
• On soulève la charge en douceur et sans à-coups.
• On garde la charge près de votre corps pour réduire le stress dorsal.
• On ne soulève pas la charge au-dessus des épaules.
• On dépose la charge en douceur, selon les principes adopter pour la soulever.

¹Ministère du Travail, de la Santé et des Solidarités, « Les principaux risques d’accidents du travail et les moyens de prévention », octobre 2023